Inutile de vous présenter encore la marque Rolls Royce, la plus mythique de l'histoire de l'automobile, longtemps considérée (et aujourd'hui encore) comme le summum des palaces à quatre roues. De nos jours, seuls les Bentley peuvent lui contester ce titre, alors que, jusqu'à la fin du siècle dernier; leur sort était étroitement lié. Ces voitures, salons (anglais, of course) sur roues, semblaient alors d'un autre âge, bien qu'actuellement on considère ces mastodontes avec déférence. Or, en 1980, la politique de la marque prit un nouveau tournant : obligés de se conformer aux nouvelles normes de pollution, de sécurité et de consommation, les Rolls n'avaient d'autre choix que de maigrir. D'autant plus que ces normes entraient en vigueur dans de nombreux pays, et notamment aux Etats-Unis, où son marché était considérable. Encore fallait-il que ce soit avec toutes les caractéristiques de la meilleure voiture de la planète. Ce travail délicat s'il en est fut confié à Fritz Feller, d'origine autrichienne, qui se livra corps et biens à la réalisation de ce qui allait devenir une illustre famille, tout autant que les montures dont la conception datait de travaux entrepris avant-guerre. Tout en s'abaissant de plusieurs centimètres, la belle avait des surfaces vitrées supérieures à son aînée, et la fluidité de sa ligne laissait à croire qu'elle était nettement plus courte que les Silver Cloud précédentes, ce qui n'était pas le cas. Ainsi abaissée et plus râblée, la nouvelle Rolls (Shadow ou Spirit, ou encore Spur) montrait un tout autre visage de la conduite automobile : elle pouvait se démener comme un beau diable et faire la nique aux Mercedes de haut de gamme (les fameuses 600), il est vrai moins onéreuses. Ce qui rendait la Silver Spirit particulièrement agréable à conduire, c'était une suspension active et des absorbeurs de chocs à gaz. Les dos d'âne paraissaient ridicules sous ses roues pilotées automatiquement. Attention! Toutes ces nouveautés n'entachaient en rien le confort légendaire des voitures de Crewe. Tableau de bord en ronce de noyer, tapis de sol en laine de mouton, cuir Conolly de la meilleure facture, sièges somptueux, tout cela donnait à l'ensemble l'impression que ces gentlemen n'avaient pas quitté leur club de prédilection. La version Silver Spur, au châssis allongé, profitait entièrement aux passagers arrière. Bref, la voiture au summum de son art.